La Cure

Préambule

Héritage unique d’un moment de notre histoire, les cures ont contribué à façonner l’image de notre pays. Un village vaudois sur deux ou trois possède un tel bâtiment, important, de qualité, beaucoup plus cossu que la ferme ou la simple maison d’habitation, mais plus modeste qu’une maison de maître construite à la même époque.

Bien faites, vastes et propices à l’accueil des paroissiens, elles étaient souvent édifiées par leurs Excellences ou avec leurs subsides. Les cures devaient aussi symboliser leur régime, sûr, solide, riche mais économe, construisant pour que cela dure, sur le roc comme le veut l’Evangile. Voisines des temples, au centre du bourg ou un peu à l’écart sur la même colline, elles donnent souvent leur caractéristique aux localités. Leurs volets verts et blancs depuis l’Indépendance vaudoise ont renforcé encore leur singularité. Aux limites du canton, là où parfois la frontière est bien compliquée, elles marquaient qu’on était en pays de Vaud.

Histoire

La cure médiévale

Dans les premières années de la réforme, le pasteur de Faoug habitait certainement la cure catholique, puisqu’il jouissait de l’ensemble des biens-fonds et des revenus de celle-ci. Nous ne savons pas si c’est sur l’emplacement de cette maison que fut édifié la première cure protestante.

La cure de 1575

Les comptes des baillis de 1575-1578 donnent plusieurs indications laissant supposer une construction neuve ou du moins une reconstruction importante. Les plans de cet édifice furent peut-être l’œuvre de Uly Jordan, architecte officiel. Le projet comprenait également la reconstruction de la grange, qui ne fut achevée qu’en 1588. En 1680 on ajouta à la cure une nouvelle galerie et un bâtiment pour le four.
La grange et le logement sont contigus et séparés par un mur coupe-feu dépassant la toiture, visible sur une gravure de 1827 de Weibel. Le corps de logis s’étend en longueur et en largeur sur un peu moins de 10 mètres. A l’Est s’élève une annexe en collombage comprenant un cabinet, un grenier et probablement l’entrée de la maison. La face côté Lac, au Nord, est occupée en partie par la galerie des privés. Les niveaux sont de hauteurs très dissemblables.

Beaucoup d’éléments de cette première cure subsistent aujourd’hui, plus ou moins visibles : les quatre murs extérieurs et la charpente à fermes trapézoïdales, la plus ancienne de ce type connue dans les cures vaudoises, à la cave, une porte d’entrée rectangulaire à large chanfrein et un poteau de chêne ainsi que divers ferrements de serrures.

Malgré la reconstruction partielle de 1765, la disposition intérieure du logement subdivisé en quatre pièces de grandeur égale, se rapproche de celles d’autres cures du 16e siècle comme Pully et Corsier. On peut conclure que la cure de Faoug est un exemple relativement bien conservé de cure du 16e siècle, malgré son aspect extérieur du 18e siécle. Elle est d’autant plus intéressante qu’elle fait partie d’une famille de bâtimenets bien déterminée : on retrouve en effet le même architecte ou les mêmes artisans lors de la reconstruction de la cure de Constantine en 1577 et à la fin du chantier de château d’Avenches vers 1570.

La reconstruction de 1765

Il est possible d’affirmer que l’aménagement actuel de la cure est le résultat des travaux de 1765. En effet les boiseries intérieures forment un bel ensemble homogène, on trouve sur les portes et les corniches des plafonds des moulures d’une richesse peu ordinaire pour une cure.
La balustrade de fer forgé de palier de l’escalier ainsi que les spirales taillées dans la pierre dénotent un travail soigné, reflet modeste mais rare de la production plus prestigieuse que l’architecte Sprüngli réalisait à Berne à cette époque.
Deux cheminées de pierre ont subsisté, l’une en style Louis XV datant certainement de 1765, l’autre plus tardive en faïence blanche.
La forme des tablettes de fenêtres est caractéristique de Sprüngli, comme on en retrouve sur la façade principale de la cure de Rossinière, la seule à avoir été construite entièrement par cet architecte dans notre Canton.

Le bâtiment du four de 1785

L’ancien four de 1680 se trouvait déjà dans un bâtiment indépendant, mais si près de la cure que les deux toits se touchaient presque. Il était entièrement délabré lorsqu’on décida en 1785 de le reconstruire ailleurs.

Cet édifice devait contenir un four, une chambre à lessive, des étables à porcs et un grenier au-dessus. Niklaus von Diesbach, commissaire des bâtiments pour le gouvernement bernois, proposa d’établir ce four à l’extrémité Est de la terrasse de la cure.

Cet édifice est intéressant à plusieurs égards. Son volume important et son toit construit en mansarde lui confèrent une élégance peu commune pour ce genre de bâtiment. La formule regroupant four, chambre à lessive, étable à porcs et grenier ne se trouve pas fréquemment dans les cures du moins plus de nos jours et dans un aussi bon état de conservation.

La grange de 1788

La grange de 1788 est en fait le résultat de l’extension de la précédente, sur trois mètres environ. Suivant les plans établis par l’architecte Zehender, une partie des murs a été conservée, mais la charpente a du être refaite entièrement à neuf.
Cette grange a la particularité d’avoir un niveau supérieur en parois ajourées faites de poutres horizontales. Elle fait partie d’une famille bien typée et restreinte qui comprend encore les granges des cures de Cotterd et de Constantine, œuvres du même architecte.
Ce type est dû à la fois à la tradition régionale et à une influence alémanique exercée notamment par les architectes officiels bernois.

La cure a été entièrement restaurée et la grange réaménagée en 1988 par le service des bâtiments de l’Etat de Vaud. Elle abrite 4 appartements et ne se visite pas.


Le présent texte est extrait de la plaquette inaugurale, reprenant notamment les commentaires et recherches de M.Marcel Blanc chef de département et Mme Monique Fontannaz historienne.